Donald Trump, la loi du plus riche, la loi du plus fort – par Christophe Clergeau

Donald Trump fait ce qu’il avait dit. La sidération n’est pas de mise, tout était annoncé depuis des mois : faire en plus grand et en plus fort ce qui n’avait été qu’ébauché lors de son premier mandat. Il revient désormais à chaque formation politique de dire si elle accepte ou combat l’agenda du président américain.

Il serait illusoire de penser le trumpisme comme une parenthèse. Même si la raison l’emportait aux Etats-Unis, les décisions de Trump vont laisser des traces indélébiles, elles sont souvent sans retour possible. La seule attitude raisonnable est de prendre en compte le scenario du pire et de s’y préparer.

L’Amérique n’est plus et ne sera plus un allié fiable, nous sommes seuls face à notre destin. En ce moment même aux Etats-Unis, les bases de données relatives au climat ou à l’environnement sont bloquées et les pages internet des institutions publiques sur le changement climatique désactivées. Considérons-nous ou pas le changement climatique comme une réalité appelant une action publique forte ? Les faits ont-ils encore pour nous de l’importance ? Des milliers de chercheurs sont renvoyés et il est mis fin à leurs contrats quand une intelligence artificielle identifie des mots interdits comme : genre, climat, couleur… Sommes-nous pour ou contre la liberté des chercheurs et l’indépendance de la science ? Les services publics sont déstabilisés, des administrations fermées, des programmes d’aide aux plus faibles stoppés, la sécurité, par exemple du trafic aérien, est menacée par les suppressions d’emplois. Croyons-nous ou pas au rôle protecteur de la puissance publique ? Les Etats-Unis sont sortis du traité de Paris sur le changement climatique, ont annoncé leur départ de l’organisation mondiale de la santé (OMS), stoppé l’essentiel de leur aide humanitaire. Sommes-nous ou non attachés au multilatéralisme et à la coopération à l’échelle de la planète ? Le pouvoir trumpiste s’assoit sur l’Etat de droit.

Aux Etats-Unis, les décisions de justice qui s’opposent aux décisions des cowboys d’Elon Musk ne sont pas respectées par l’Etat fédéral et en Europe, Trump veut imposer sa loi à l’Ukraine, Etat souverain, au mépris du droit international. Le droit et le respect de la justice ont-ils encore pour nous une valeur cardinale ? Les plateformes numériques ne combattent plus la haine en ligne, ni les fake news. Elles décident, via des algorithmes opaques, du poids de la parole des uns et des autres, font et défont les notoriétés et les élections. Acceptons-nous que ces entreprises plus puissantes que les Etats bafouent les lois européennes et détruisent nos démocraties ? Vassalité.

Enfin, Trump prétend faire l’alliance des « forts » et, main dans la main avec Poutine, détruire la souveraineté ukrainienne, détruire l’Europe en tant que puissance et nous réduire à la vassalité. Sommes-nous prêts ou pas à défendre nos libertés, la souveraineté de l’Ukraine et celle de l’Union Européenne ? Les extrêmes droites européennes, quelles qu’elles soient, Marine Le Pen et Jordan Bardella en tête, disaient il y a encore quelques jours : « Trump a raison, inspirons-nous de lui en Europe et dans chacun de nos pays ». Elles sont aujourd’hui comme gênées aux entournures.

Maintenant, elles doivent répondre à ces questions comme doit aussi le faire cette partie de la droite française et européenne qui partageait leur fascination pour l’agenda trumpiste. La Chine nous attaque, la Russie nous agresse, les Etats-Unis nous abandonnent et nous trahissent. Ils opposent à nos sociétés un modèle fondé uniquement sur la loi des plus forts et des plus riches, le pouvoir de l’argent et de la violence. Ceux qui refuseraient de se révolter et de résister ne seraient que les laquais de nos adversaires et les traîtres à la France et à l’Europe.

Christophe Clergeau, député européen, vice-président du groupe socialiste et démocrates

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