Union européenne, un Noël bleu

Un « pacte européen pour les océans », voilà une des nouveautés proposées par Ursula von der Leyen dans son programme d’action pour les cinq prochaines années.

La mer est une des grandes oubliées des politiques européennes. Je pourrais lister les nombreuses actions qui ont un impact sur les milieux et les activités maritimes, rappeler aussi l’importance de la politique commune de la pêche. Mais nous n’avons pu compter ni sur une approche globale des questions maritimes, ni sur une ambition maritime européenne.

Les Etats membres ont toujours considéré la mer comme un sujet régalien qui ne pouvait se partager à l’échelle européenne. Ils ont ainsi entravé la directive européenne sur la planification spatiale maritime. Au fil des élargissements, l’Europe a renforcé sa dimension continentale même si elle y a gagné de nouveaux rivages avec la Baltique ou la mer Noire. Enfin la mer est présente dans le parcours de vie de chacun d’entre nous, mais reste absente des priorités politiques dès que l’on s’éloigne de plus de 50 km des côtes. Ainsi seule la Bretagne en France se vit comme une région profondément maritime.

Souveraineté. Dès lors, pourquoi revient donc aujourd’hui au premier plan l’idée d’un « pacte européen des océans » ? C’est d’abord lié à la prise de conscience que la souveraineté européenne et son avenir écologique passent par les océans. Nous dépendons des océans, radicalement, totalement. A l’heure où les forêts sont défaillantes, l’océan est le plus important puits de carbone avec une capacité de stockage fragilisée mais encore robuste. Les océans sont aussi un formidable réservoir de biodiversité, largement inexplorée. Notre sécurité et notre souveraineté se jouent en mer, plus de 90 % des produits importés en Europe le sont via le transport maritime, notre dépendance croissante vis-à-vis de l’Asie pour la construction des navires devient une menace.

Notre capacité à produire les électrons dont nous avons besoin pour réussir la transition énergétique repose sur le développement des énergies marines renouvelables. Notre alimentation dépend aussi sur des océans avec la pêche et les cultures maritimes. Il devenait impossible de négliger l’avenir des océans et des littoraux dont la pérennité même dépend d’une politique intégrée visant à restaurer et protéger les fondamentaux écologiques des océans.

Cette prise de conscience a été accompagnée par une formidable mobilisation citoyenne et politique autour de Pascal Lamy et Geneviève Pons pour « Europe Jacques Delors » et Tiago Pitta e Cunha pour « Oceano Azul foundation », et autour des ONG bleues. Les uns et les autres ont publié leur « blue manifesto » début 2024, et ces propositions ont été placées au coeur de la campagne des européennes par des députés sortants comme Catherine Chabaud, Pierre Karleskind ou moimême, repris par les socialistes, les centristes et les verts, puis par Ursula von der Leyen.

Il faut désormais transformer l’essai et passer de l’annonce politique à sa concrétisation avec au coeur du « pacte européen pour les océans » des objectifs ambitieux, écologiques, économiques et sociaux, un plan d’action, des outils financiers et des initiatives législatives. Après le pacte vert doit donc venir le pacte bleu qui est tout aussi crucial.

Christophe Clergeau est député européen, vice-président du groupe Socialistes et Démocrates.

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