Communiqué de presse
Bruxelles, le mardi 20 juin 2023
L’association Pollinis, une ONG indépendante qui agit pour stopper l’extinction des abeilles et autres insectes pollinisateurs dont dépend l’ensemble de la biodiversité, vient de publier un nouveau rapport accablant sur les expérimentations en plein champ d’insecticides à ARN interférent – ou ARNi – qui ont la particularité de rendre muette l’expression de certains gènes, conduisant ainsi à la mort de l’espèce visée.
Ces pesticides ARNi sont développés pour lutter contre des insectes comme le Doryphore de la pomme de terre mais ils causent également la mort d’autres insectes notamment des espèces mellifères. Pour Christophe Clergeau, Député européen membre de la commission de l’Environnement, ce nouveau type de pesticides n’a rien d’anodin : « Compte tenu de la proximité génétique des différents insectes, l’utilisation de ces pesticides issus du génie génétique impliquent des risques potentiels majeurs pour des espèces non ciblées déjà fragilisées telles que des insectes polinisateurs, et donc une menace pour la biodiversité ».
Le remarquable travail d’enquête mené par l’association Pollinis a mis à jour l’existence d’essais en plein champ d’ARNi utilisé en spray sur les cultures en France et dans plusieurs États de l’Union européenne sur la base des déclarations de l’entreprise GreenLight Biosciences.
Interrogée par Pollinis, l’ANSES – l’autorité sanitaire française – a répondu ne pas avoir pu évaluer ces essais en plein champ dans la mesure où ils ont été conduits grâce à une dérogation aux permis d’expérimentation pour les produits phytosanitaires, procédure relevant du ministère de l’Agriculture.
Or, si le Code rural prévoit bien la possibilité d’octroyer des dérogations aux permis d’expérimentation à l’article R253-32, l’article suivant R253-33 précise qu’en cas d’expérimentation comportant la dissémination volontaire dans l’environnement de produits phytopharmaceutiques composés en tout ou partie d’organismes génétiquement modifiés, le permis d’expérimentation doit être délivré par le directeur général de l’ANSES après l’accord du ministre chargé de l’Environnement.
« Il y a de quoi s’interroger sur la validité de la dérogation aux permis d’expérimentation octroyée par le Ministère de l’Agriculture et il est pour le moins troublant que l’ANSES n’ait même pas été associée. J’ose espérer que l’on ne s’est pas contenté de signer un chèque en blanc à cette entreprise » ajoute Christophe Clergeau.
Dans ces circonstances, Christophe Clergeau indique : « J’ai adressé un courrier à la Première Ministre pour lui poser ces questions :
- Le ministère de l’Agriculture a-t-il outrepassé ses habilitations dans ce cas précis d’essais en plein champ d’un pesticide ne répondant à aucune catégorie existante ?
- Comment comptez-vous faire respecter les prérogatives de l’ANSES dans ces cas de figure ?
- Vous engagez-vous à assurer la transparence de ces essais en plein champ ?
- Quelle évaluation complète des risques les autorités publiques ont-elles engagées dans le cadre de cette dérogation, si oui des enseignements ont-ils pu en être tirés et si non comment comptez-vous y remédier ?
- Quelles initiatives comptez-vous prendre pour vous assurer de la disponibilité au niveau national et européen d’une science indépendante permettant de mener une évaluation de ces nouvelles technologies OGM sans conflit d’intérêts ?
En outre, Christophe Clergeau a demandé à la Première Ministre de vérifier, comme le Code Rural le stipule, que les productions végétales issues de ces essais avaient bien été détruites. « Compte tenu de l’absence de certitude scientifique sur cette technologie, ce type d’expérimentation ne doit avoir lieu qu’en laboratoire » tance Christophe Clergeau.